
Il y a des jours où le monde semble glisser hors de toi, où tu avances sans vraiment marcher, où tu parles sans vraiment être là.
Et puis, au milieu de ce brouillard, quelque chose d’inattendu se produit :
une main se tend, d’un endroit où tu ne regardais même pas.
Et c’est étrange comme, dans ces instants-là, un souffle revient.
Pas un répit.
Une ouverture.
Aujourd’hui, ma journée a eu la texture d’un rêve mal fixé : un réveil tardif, le corps encore engourdi par les anxiolytiques, un repas en famille où j’étais présente sans vraiment l’être, où je souriais parce qu’il fallait sourire, mais sans émotion derrière.
Puis il y a eu ce rendez-vous pour le canapé.
Un geste simple, banal, presque logistique : trouver un espace doux pour les futures soirées pyjama, pour recréer un cocon malgré la tempête qui secoue tout autour.
Une façon de préparer un nid alors que tout s’effondre encore un peu.
Et puis… il y a eu elle.
Une personne à laquelle je n’aurais jamais pensé.
Pas une amie, pas une confidente, pas quelqu’un de proche.
Juste une silhouette du passé, un visage familier mais sans attache, quelqu’un qui gravitait autrefois autour de nous sans jamais m’approcher vraiment.
Elle m’a envoyé un message.
Elle m’a demandé si j’étais seule.
Elle m’a demandé si je pouvais venir.
J’y suis allée en me fermant déjà de l’intérieur, prête à mettre une barrière, prête à dire :
« Occupe-toi de ce qui te regarde. »
Mais ce n’est pas ce qui s’est passé.
Elle m’a proposé un café.
Elle s’est assise en face de moi et, sans détour, elle m’a dit qu’elle s’inquiétait.
Qu’elle craignait que je m’effondre pour de bon.
Qu’elle avait peur que je fasse l’irréparable.
Elle ne cherchait ni à fouiller ni à juger.
Elle voulait comprendre.
Elle voulait juste savoir où j’avais mal, où ça tirait, où ça cassait encore.
Elle a posé des questions que personne n’osait poser.
Elle m’a demandé mes douleurs, mes manques, mes blessures.
Elle m’a demandé ce que je reprochais à ma famille, ce qui m’avait détruite sans que personne ne s’en aperçoive.
Et je lui ai parlé.
Je lui ai tout raconté.
Je lui ai confié mes lettres.
Elle les a lues — ou tenté de les lire — avec une émotion que je n’attendais pas.
Elle a été bouleversée.
Elle n’a pas jugé.
Elle n’a pas minimisé.
Elle n’a pas détourné les yeux.
Elle a simplement été là.
Vraiment là.
Une présence sincère, authentique, sans intérêt.
Une main posée sur la vitre de ma tempête.
Et elle m’a dit cette phrase que je n’oublierai pas :
« Tu n’as pas à traverser tout ça toute seule. »
Alors que c’est exactement ce que j’ai toujours fait.
Aujourd’hui, la vie m’a rappelé quelque chose de précieux :
la lumière ne vient pas toujours d’où on l’attend.
Parfois, elle surgit d’un endroit délaissé, d’une personne presque floue, d’un bout du passé que tu n’avais jamais regardé en face.
Et cette main posée contre la vitre de ma pluie…
elle m’a fait respirer un peu.
Juste assez pour tenir.
Juste assez pour croire que je peux encore avancer.
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